Audiovisuel public : adoption au Sénat de la réforme poussée par Rachida Dati

Les sénateurs ont adopté en deuxième lecture vendredi 11 juillet 2025 la réforme de l’audiovisuel public.
Les sénateurs ont adopté en deuxième lecture vendredi 11 juillet 2025 la réforme de l’audiovisuel public. Alexis Sciard / IP3 PRESS/MAXPPP
Les sénateurs ont adopté en deuxième lecture, vendredi 11 juillet, la réforme de l’audiovisuel public souhaitée par Rachida Dati. Les débats ont été abrégés le matin même par le recours au vote bloqué, un procédé gouvernemental vivement contesté par la gauche.

Fin de session chaotique au Parlement : les sénateurs ont approuvé largement vendredi 11 juillet en deuxième lecture la réforme de l’audiovisuel public, au terme de débats écourtés grâce à l’arme constitutionnelle du « vote bloqué », un choix du gouvernement vivement contesté par la gauche.

Le texte a été adopté par 194 voix contre 113. Ce vote clôt la session extraordinaire du Parlement, qui reprendra ses travaux le 22 septembre.

L’examen du texte a tourné court au Palais du Luxembourg. Face à « l’obstruction » de la gauche, la ministre de la culture Rachida Dati (LR) a annoncé vendredi matin que le gouvernement demandait au Sénat « de se prononcer par un vote unique sur l’ensemble du texte », « en application de l’article 44 alinéa 3 de la Constitution ». Cette procédure très rarement utilisée permet d’accélérer les débats en n’organisant qu’un seul vote, sur le texte et les amendements que le gouvernement choisit de conserver.

La proposition de loi de Laurent Lafon (UDI) prévoit pour l’essentiel de créer le 1er janvier 2026 une holding, France Médias, qui chapeauterait France Télévisions, Radio France et l’Ina (Institut national de l’audiovisuel), sous l’autorité d’un président-directeur général.

La gauche claque la porte

Les débats jeudi avaient été marqués par une particulière lenteur, entre suspensions de séance à répétition, rappels au règlement, motions de rejet préalable, invectives en pagaille… À la manœuvre, la gauche, qui craint que la réforme ne soit l’occasion d’une reprise en main politique et d’une réduction du budget de l’audiovisuel public.

Après deux heures de suspension vendredi matin, les travaux ont repris, occasion pour les groupes de gauche de protester à l’unisson contre un « coup de force » démocratique, selon le mot de l’ancienne ministre socialiste Laurence Rossignol. « On parle de liberté de la presse. Mais commençons déjà par respecter les droits du Parlement », a-t-elle tonné, rappelant que le Sénat avait d’autres outils à sa disposition pour discipliner les discussions.

« C’est vous qui êtes responsables du fait que le débat ne peut pas avoir lieu. Ce n’est pas nous », leur a rétorqué le rapporteur du texte, Cédric Vial (groupe LR). Le président de la commission de la culture Laurent Lafon a lui aussi défendu la décision du gouvernement, pointant une obstruction « caractérisée » destinée à « empêcher que le Sénat confirme son soutien » au texte.

Victoire « à la Pyrrhus » ?

Peu après la reprise de la séance en début d’après-midi, les différents groupes de gauche ont renouvelé leurs critiques sur le fond et la forme, avant de quitter les lieux. Le texte a finalement été adopté largement, par 194 voix contre 113. Une victoire au forceps pour Rachida Dati, qui défend bec et ongles la réforme depuis son entrée au gouvernement, face à l’hostilité des syndicats et à un agenda parlementaire contrarié.

Selon des sources parlementaires, la décision de déclencher le « vote bloqué » était sur la table depuis jeudi. Mais, alors que le président du Sénat et le ministre des relations avec le Parlement étaient enclins à laisser le débat se dérouler, « c’est bien Rachida Dati », en première ligne face à la gauche, qui « à un moment donné (…) a tranché pour tout le monde », selon un poids lourd.

Désormais, le texte devrait revenir à l’automne à l’Assemblée, à une date indéterminée. « Ce passage en force au Sénat sera une victoire à la Pyrrhus. (…) Nous serons mobilisés dès la rentrée pour lui faire obstacle », a promis le député Aurélien Saintoul (LFI).

Le texte bénéficie à la chambre basse du soutien de la majorité du socle commun et de la relative bienveillance du RN, « plutôt partisan de s’abstenir » selon son vice-président Sébastien Chenu.